Ma SaintéLyon

Ma SaintéLyon

Ça y est les douleurs aux jambes sont passées. Et j’ai terminé ma SaintéLyon ! Et tous les copains aussi ! Retour sur une nuit interminable.

Départ de Paris à 13h le samedi. 11h avant la course. À la gare, on distingue assez facilement les autres participants : sacs de trail, gros sacs de sports, ou déjà habillés pour l’épreuve.

Arrivée à Lyon à 15h. Le temps de prendre le métro, de se perdre un peu, on arrive vers 16h à la Halle Tony Garnier. On file chercher les dossards. Ça sera 6943 pour moi. Plus que 8h avant le départ.

dossard

On se pose ensuite sur les gradins. Et c’est parti pour une longue attente. Heureusement qu’on est venu à une petite dizaine, le temps passe plus vite. Plus que 7h.

le PUC sainté

Quand nous sommes arrivés, grosse file d’attente pour prendre les tickets pour la navette. En y retournant 1h plus tard, pas d’attente. Ca nous a bien occupé 5 minutes. On passe le temps à parler, finaliser la préparation des sacs. 18h. Plus que 6h. Encore 6h ! Les filles partent acheter à manger. Avec Rémi, on avait prévu le coup, tupperware de pâtes. Pas question de laisser la digestion faire des siennes cette nuit.

19h. Plus que 5h. Les premiers partent pour rejoindre Sainté en train. Kotaro file prendre sa navette pour la pasta-party. Les filles se changent. Le stress monte pour certains. Enfin on sent que l’heure approche.

20h : on prend la navette. 45 minutes de trajet jusqu’à Sainté. J’espère n’avoir rien oublié. Pour rentrer dans le gymnase, contrôle de sécurité. On me demande si j’ai une fourchette en métal. Non bien sûr. Le tupperware est sous les yeux de l’agent de sécurité. Je distingue la forme de la fourchette… Plus que 3h !!

Le gymnase à Sainté

Dans le gymnase, les traileurs se sont installés pour leur sieste d’avant course. Matelas, sac de couchage… Ils ont tout préparés. Avec Rémi, on se prend un thé chaud et quelques carrés de chocolat. Puis pour retrouver Kotaro et ses collègues, nous nous dirigeons vers l’autre bâtiment. Moins rempli, moins bruyant : ça devrait être pas mal pour la sieste. Je m’allonge sur le sol, sans matelas ni sac de couchage, je mets un buff sur les yeux, la musique dans le casque, la capuche pour bien isoler, et c’est parti pour 1h de sommeil. Bon seulement 45 minutes, mais du bon repos quand même !

H-2 : il est temps de se changer. Je prends bien mon temps, tout doit être en place et ne pas bouger jusqu’au lendemain. Le genou est strapé pour limiter les risques de tendinite. Les chaussettes bien en place, je ne veux pas d’ampoules. Les chaussures relacées, bien resserrées sur le devant comme expliqué par Thomas. Les lacets avec un nœud bien solides, et rangés dans leur compartiment dédié. Le collant bien positionné sur les chevilles pour protéger du froid. Deux tours de cou pour bien protéger la gorge. La frontale resserrée sur le buff de tête. Le sac de trail bien en place. L’équipe de relai du PUC nous rejoint, ca sent le départ !

le départ

On pose les sacs, un dernier arrêt au stand, et on s’avance vers la ligne de départ. Il reste moins d‘1 heure avant la première vague.

La première vague part. La seconde s’élance. On se demande si l’on fera partie de la suivante, ou s’il nous faudra attendre encore 10, 20 ou 30 minutes. Je réalise enfin que je vais bientôt m’élancer pour 72km. On fait passer le temps en parlant avec nos voisins. Les blagues fusent. On sent le stress.

00h10 : notre départ !

Goooooooooo !!!

Rapidement Kotaro perd ses collègues. Nous courrons à 3, Rémi, Kotaro et moi. Kotaro donne le rythme, Rémi ne veut pas suivre à cette allure. Moi ça me convient. Nous perdons donc Rémi dès les premiers kilomètres. C’était le deal, sur une course pareille, chacun gère comme il le sent. Après 3 jours sans sport, j’ai les jambes qui avancent toutes seules.

Nous doublons donc pas mal de monde sur les premiers kilomètres bitumés. Et puis 7ème kilomètre. Premier chemin. Première montée. Premier bouchon. On se faufile sur les bords de chemin pour continuer à grimper en trottinant.

Les lumières !!

Je profite de quelques secondes à attendre Kotaro pour regarder le chapelets de lumières défiler derrière nous. C’est magique.

Les chemins s’enchainent, les côtes sont toujours embouteillées. Et puis je double, je me retourne et cherche Kotaro. Je l’attends mais je ne le retrouve pas. Il y a trop de monde, est-ce qu’il est passé sans me voir ? Je continue mon chemin, ne le retrouve pas. Je ralentis un peu. Toujours pas visible. Tant pis, on verra si je le vois au ravitaillement.

Cela fait déjà 1h30 que je cours. Les jambes sont en parfait état, elles enchainent les kilomètres et le dénivelé sans broncher. Le prochain ravitaillement devrait arriver d’ici 1 ou 2km. Je n’ai pas prévu de m’y arrêter, j’ai encore de l’eau. Je profite des montées surchargées pour me ravitailler avec ma propre nourriture.

Premier ravitaillement : pas d’arrêt. Et c’est reparti pour une petite quinzaine de kilomètre avant le ravitaillement suivant. Toujours beaucoup de monde sur la route. Le temps passe vite. Déjà 2h de course. Un peu moins de 20km j’imagine. Et puis le panneau dont on m’avait parlé, indiquant 50km restant. Je suis frais, le panneau ne me démoralise pas, bien au contraire. Déjà 22km de courus, la course va bientôt vraiment commencer. Encore un peu plus de 5km avant le prochain ravitaillement. Un peu plus de 30 minutes.

Le chemin commence à être moins rempli. Je dois parfois mettre ma frontale à pleine puissance pour passer d’un groupe à un autre. Je me dis que je vais peut-être un peu vite vu que je ne fais que doubler, sans me faire trop doubler moi-même. Mais bon, tout ce qui est pris est pris, et ce qui est perdu ne se rattrape pas il parait. On verra plus tard si je regrette ce train plus rapide qu’à l’entraînement.

De belles descentes verglacées me changent les idées. Un village en contrebas. Probablement le ravitaillement. Je regarde ma montre : 3h10. 3h de course seulement. J’ai été beaucoup trop rapide, la première portion étant celle avec le plus fort dénivelé positif d’après le topo. J’avais pensé faire ce premier tiers en 4h. Du coup, pour les 10h de course, je n’ai plus qu’à gérer un gros marathon en moins de 7h. Les jambes sont toujours bien fraiches, ça devrait le faire ! Je me rends compte que depuis un moment, je double beaucoup moins de monde. Je crois bien que j’ai trouvé les coureurs qui sont à peu près à mon allure !

J’entre au ravitaillement, je remplis les gourdes. Je me sers un verre de Pepsi. Je vois Tim d’un coin de l’œil, je l’appelle en finissant de boire. Tim était dans l’équipe relai, il avait prévu de faire les 1ers 28km à fond, puis d’attendre le dernier d’entre nous pour l’accompagner jusqu’au bout. Je lui explique que j’ai perdu Rémi il y a bien longtemps, je lui demande si celui-ci n’est pas déjà passé, Tim ne l’a pas vu, ni Kotaro non plus. Il m’explique qu’il est tombé, qu’il s’est fait soigner, et que ça fait 30 minutes qu’il attend dans le froid, et que donc il préfère repartir avec moi. Deal !

J’envoie un SMS à Rémi pour le prévenir que je lui vole Tim. Un verre de soupe et c’est reparti ! La remise en route des jambes se fait sans trop galérer. Je sens un début de fatigue, mais très léger. Ça s’annonce bien pour la suite !

Je parle un peu à Tim. Je refais des calculs dans ma tête, et je réalise d’un coup que je peux peut-être faire 9h si je tiens sur le même rythme. 22km à 8km/h, avec des ravitaillements, ça fait 6h. Wow ! Je promets une bouteille de champ’ à Tim s’il m’aide à garder ce rythme (on avait plaisanté avant le départ sur le fait qu’il m’offrirait le champagne si je faisais moins que son meilleur temps, soit 6h44. Impossible donc.).

En lui parlant, j’apprends qu’il s’est vraiment fait mal, qu’il est bien tombé dans l’une des descentes verglacées 1km avant d’arriver au relai. Mais bon, il peut continuer. Il a l’habitude des trails (et de tomber), donc je ne m’inquiète pas.

3h40 de course. 35km environ. La grosse côte que j’avais repérée sur le topo est devant nous. Cette fois-ci, impossible de trottiner pour doubler. C’est bien trop raide. Et l’escalade interminable commence. Aucun repos, on attaque vraiment la pente de front, sans zone plate. J’en profite pour regarder mon téléphone. Rémi m’a répondu, il est passé par le 2e ravitaillement. Je le préviens de cette difficulté tout en continuant mon escalade. 13 minutes pour faire 1km de montée, quasiment 200m de dénivelé positif. Une horreur. Au sommet, la reprise du footing est difficile. La moindre butte se fait maintenant en marchant. C’est la mi-course !

Maintenant, d’après le topo, on descend jusqu’à Lyon. Avec encore une ou deux buttes, mais rien de méchant par rapport à ce que l’on a déjà fait. Enfin c’est la théorie. Le moral essaye de s’accrocher au moindre signe positif. On avance, puis Tim me dit qu’après cette montée, ça descend, y’a un virage, ça monte, puis on arrive sur un ravitaillement. Je n’entends que le mot “ravitaillement”. Je veux qu’on arrive sur ce nouveau point. Cela marquera la moitié de ce segment du milieu, donc une bonne moitié bien grosse de la course. À peu près 40km. À peu près un marathon. Un truc que je n’avais jamais fait avant.

Depuis cette montée, j’ai des crampes qui apparaissent aux mollets et autour des chevilles. C’est désagréable, mais elles ne sont pas longue (une fraction de seconde) et généralement restreinte à une sous-partie du muscle. Chaque morceau de route me permet de poser les pieds sans me poser de question et me permet de me détendre ces muscles, alors que chaque bout de chemin est synonyme d’une compensation du pied qui risque de partir en crampe. Mais je ne m’arrête pas, on verra ça au ravitaillement.

On continue d’avancer, et finalement le ravitaillement. Je me rends compte que lors de la grosse côte, j’ai bien épuisé mon stock d’eau. Je remplis mes gourdes. Une soupe de plus pour me réchauffer. Une banane pour remplir l’estomac. Un Pepsi pour le sucre. Je m’étire les jambes pour lutter contre les crampes. Et c’est reparti. Dans 11km (j’ai fini par craquer et je demande maintenant parfois les distances à Tim) le prochain relai. Là-bas, Thomas doit être arrivé. S’il est en forme, il y a moyen de le motiver pour qu’il m’accompagne à l’arrivée. Cela permettrait à Tim d’attendre Rémi au chaud pour l’aider à terminer. Il est 4h50. J’envoie un message à Thomas pour lui dire que j’arriverai 1h30 plus tard. Et nous revoilà sur des chemins.

Je commence à regarder ma montre trop souvent. 5h10. Cela fait 5h que je cours. Les jambes commencent à être douloureuses. Les crampes qui ne se déclenchaient avant que sur des surfaces accidentées commencent à survenir sur des surfaces quasi-planes. J’ai fait plus de la moitié. J’ai fait plus de la moitié du dénivelé. Tim continue à me donner des indications sur la topographie des prochains kilomètres. Ça ne permet pas de gérer les efforts, mais ça permet d’être moins surpris. En théorie. Car régulièrement on tombe sur une butte qu’il avait oublié. Et finalement ça en devient plus agréable puisqu’on oublie l’obstacle actuel pour se focaliser sur le prochain qui a été décrit.

la sainté

La fatigue se faisant maintenant cruellement sentir, le cerveau se déconnecte maintenant à une vitesse hallucinante. Les muscles bougent tout seuls, les yeux transmettent leurs informations sans que l’on prenne vraiment conscience de ce qu’ils ont aperçu. J’attends les montées avec impatience pour pouvoir marcher. Et les descentes pour détendre les muscles fatigués de la montée. Et les zones plus roulantes, dans l’espoir d’y trouver une route plane, où les crampes ne se déclencheront plus. Il m’a fallu une petite pause d’une minute pour calmer une crampe autour de la cheville gauche qui ne voulait pas s’arrêter, j’essaye donc maintenant de limiter les mouvements de chevilles au maximum.

Presque 6h de course déjà. Une descente à pic. Mais le sol est plat, ce n’est pas trop technique. Tim accélère. Il m’attend. Je le dépasse. Nous dépassons de nombreux coureurs fatigués qui ne peuvent même plus courir en descente. D’autres qui tombent. D’autres qui remontent la pente, probablement pour rejoindre la route suite à un malaise ou une blessure. Arrivée en bas, on voit déjà l’autre versant qui monte autant que ce que l’on vient de descendre. Très bien, je vais pouvoir me reposer un peu. Marcher quoi. Et le prochain ravitaillement n’est plus qu’à deux ou trois kilomètres. Dans la montée, je vérifie mon téléphone : Thomas s’est blessé, il ne m’attendra pas. Dommage. En haut de la côte, c’est verglacé. Obligé de courir sur l’herbe des bas-côtés, la terre est glissante.

6h de course ca y est. Je suis au dernier relai. Plus que 22km avant l’arrivée. J’ai donc fait 50km. En 6h. Je suis donc toujours bien en avance sur le temps que je voulais faire. En faisant la fin en moins de 3h, je serai sous les 9h. Je commence à réaliser qu’il ne reste plus qu’un semi-marathon. L’objectif que je m’étais fixé. Maintenant plus rien ne peut m’arrêter !! Ravitaillement soupe / banane / Pepsi. Reprise en marchant. Cela monte en sortie du ravitaillement. Puis on se remet à trottiner. Surtout ne jamais s’arrêter. Kotaro m’avait prévenu : le danger c’est de suivre le rythme des autres. Il ne faut s’arrêter que lorsque l’on a envie, pas quand les autres sont à l’arrêt. Surtout en fin de course, on croise beaucoup de gens épuisés. Alors qu’il me reste assez d’énergie mentale et physique pour pouvoir remuer les jambes.

Depuis le ravitaillement, beaucoup de descente. Elles s’enchainent. Au loin, j’aperçois Lyon. Enfin je pense. Tim n’est pas sûr non plus, et nous n’y allons pas en ligne droite. Tant pis, pour moi ca sera maintenant comme si l’on avait entraperçu l’arrivée. La descente est sans fin. Tant mieux. Les jambes se détendent. Plus de signe de crampes. Et soudain… LE PANNEAU 15KM. Je ne comprends pas d’où il sort. Pour moi, il en restait encore 20. 5km ont donc disparu. Gros coup de boost au moral. Et puis 15km, c’est vraiment facile, c’est une sortie longue. Un peu plus d’une heure d’habitude. À mon 8km/h d’entrainement trail, ça se fera en 2h. Je suis donc large pour arriver en moins de 9h. Il n’est pas encore 7h du matin. Le soleil commence à se lever.

7h du matin. Après une bonne grosse côte, j’atteins le dernier ravitaillement. Cette difficulté était la dernière que j’avais repérée sur le parcours. Après quelques additions, je suppose que nous en sommes à 60km de course environ. Il me reste 12km à parcourir. Donc maintenant il me reste… 1h30 de course ?!? Je ne veux pas m’arrêter à ce ravitaillement. Finalement un verre de pepsi pour la route et c’est reparti. 1km plus loin, je me rends compte que j’aurais du aller aux toilettes. Petite vidange en sortie de village. La première. La seule. Mes bidons sont encore à moitié plein, ça devrait le faire pour terminer. De toute façon nous avons déjà dépassé le ravitaillement. C’est trop tard. Le cerveau ne fonctionne plus normalement.

12km, c’est ce que j’avais noté dans un coin de ma tête comme étant l’arrivée en banlieue de Lyon. Normalement nous allons maintenant alterner entre champs et villages, puis 5km plus tard, nous devrions entrer pour de bon en agglomération Lyonnaise. 7h18. Plus que 10km. J’envoie des messages sur les réseaux sociaux pour que les amis du PUC aient le temps de se réveiller. Je veux vivre l’arrivée avec eux. La moindre bosse est maintenant terrible. Je ne peux plus monter en trottinant ne serait-ce qu’une dizaine de mètres. Je me force à marcher rapidement. En haut, je commence à avoir du mal à reprendre ma respiration pour me remettre au footing. Tim me fait gagner 10 secondes à chaque fois sur le temps que j’aurais mis à me remettre en route par moi-même. Le parcours continue à descendre. Tim m’explique plusieurs fois les 2 ou 3 derniers kilomètres. Un escalier, on passe sous un pont, on remonte sur un pont, un deuxième pont, la halle, sprinter, moins d’un kilomètre. Ce n’est pas encore très clair dans mon esprit, mais je comprends qu’en bas de l’escalier, il me restera environ un kilomètre, et qu’il faudra donc tout lâcher. Le soleil se lève pour de bon.

On continue à descendre. On traverse un cours d’eau. Et là en face, cela monte sévère. Cela fait déjà 10 minutes que j’attends le panneau 5km. Et à la place, une côte. Interminable. 10 minutes à grimper. Et puis en haut, le panneau. Ça y est ! Il est 8h. On redescend en zigzaguant dans un parc. Et puis cela remonte. On arrive en milieu urbain. 4km. Encore une petite côte, puis Tim me dit prochaine à droite, prochaine à gauche, escalier. Je comprends que nous y arrivons enfin. Je me force à relancer dans les virages. Le moindre dénivelé positif est insupportable. Et puis voilà l’escalier.

D’en haut, je reconnais le Musée des Confluences que nous avions aperçu à l’aller dans la navette. Nous sommes donc très proche. Je ne reconnais pourtant pas la Halle Tony Garnier. Mais j’ai du mal à distinguer nettement les formes au loin. Je suis concentré sur mes pieds depuis bien trop longtemps. Je descends l’escalier. Impossible de courir. La descente se fait en douceur. Les quelques coureurs restant autour de moi sont dans le même état. En bas, je distingue les coureurs devant qui descendent sur le quai. Je vois donc où je dois aller ensuite. Je sais que c’est le moment de se lâcher. J’accélère un peu pour me donner du rythme. Une fois descendu sur le quai, je sens que les jambes ne veulent pas suivre. Je les force à accomplir ce dernier effort. Un escalier pour remonter sur un pont. Les marches sont trop hautes. Tim est toujours là à m’attendre. Lui qui m’aura répété plusieurs fois de filer tout seul si je veux car il fatigue. Sur le pont, il ne reste plus que 500m. Plus que des faux plats montant et descendants. J’accélère. Le deuxième pont est verglacé. C’est pas grave. En sortant de cette zone dangereuse, je peux enfin brûler les dernières calories qui me restent. Une dernière ligne droite. Je distingue la Halle. Je me demande dans quel sens nous allons arriver. Mais pas le temps de douter, je suis déjà en train de la longer. Au bout, un virage qui me permettra d’y rentrer et de parcourir les quelques mètres restant. Tim me dit de ne pas lâcher, qu’il ne reste que 100m. Il reste derrière moi à me pousser à aller plus vite ! Dans le virage, Élise m’attend ! Je comprends que je suis au bout de mes souffrances. Une dernière ligne droite, un virage, et c’est l’arrivée. JE SUIS ARRIVÉ. 72km. Il est 8h40 à ma montre. 8h30 de course donc. 1h30 de mieux que ce que je pensais. Je suis heureux, essoufflé, déboussolé. Je remercie Tim encore et encore.

Nous nous dirigeons vers le ravitaillement. J’ai faim. J’ai soif. Je prends un verre, puis un autre. Mais la nourriture ne passe pas. Je n’ai pas si faim en fait. Je sens les abdos qui ont travaillé, les jambes qui ne veulent plus bouger, les bras fatigués d’équilibrer le corps. Je veux me poser. Je passe récupérer mon tshirt de finisher, et puis je sors retrouver les copains. Élise qui s’est dépêchée de venir en voyant que j’allais arriver bien plus tôt que prévu. Et qui a même été cherché des croissants, car ceux qu’elle nous avait prévu ne seront livrés qu’à 10h par son père. Merci copine ! Et puis Thomas, qui s’est bougé malgré son entorse. Merci coach ! Nous nous dirigeons tranquillement vers les gradins. J’ai du mal à monter les escaliers, mais qu’est-ce que c’est agréable de s’asseoir !

Miam

Simon est déjà dans les gradins. Nous sommes 4. Je prends des nouvelles du relai, des Saintésprint. Mon cerveau a du mal à assimiler les informations. Vers 9h, les filles du PUC arrivent. Je réponds aux questions, mais je suis un zombie. Le temps passe vite, mais les jambes ne veulent toujours rien savoir. Kotaro arrive à 9h30. Je ne peux pas aller l’encourager, mes jambes refusent. Mais Kotaro est bien arrivé !. 9h45 Élise se met en route pour aller encourager Rémi. Cette fois-ci je trouve la force de me lever. Je ne me suis pas rhabillé, dehors il fait froid. Mais les jambes font bien plus mal que le froid. On attend Rémi. Et le voilà. Il a l’air d’avoir souffert, mais il n’est pas complètement éclaté. J’essaye de le motiver à sprinter. Il s’en fout. Il l’a fait lui aussi !

Dans les gradins, le père d’Élise est arrivé avec les croissants pour tout le monde. Cette SaintéLyon est terminée pour nous !

Impressions

C’était pour moi le premier trail, mon premier marathon, ma première course longue. Je suis allé au bout sans jamais penser à abandonner. Et je l’ai fait. Et je me suis surpassé pour faire bien mieux que ce que je pensais possible. Dans un coin de ma tête, je savais qu’à 8km/h, je pouvais faire 9h. Mais c’était sans les ravitaillements, et sans compter que le dénivelé était bien plus important que ce que j’avais fait jusque là. Et qu’après 36km, c’était pour moi l’inconnu. Quand j’ai vu qu’à 15km de l’arrivée je pouvais faire un temps pareil, je me suis forcé au mental à continuer sur le même rythme. Ça aura pour moi été la partie la plus dure de la course. Et pourtant, j’ai eu des crampes pendant 30km. Mais c’était de la douleur maitrisable. Alors que se forcer à conserver un rythme, c’est lutter contre le corps, mais aussi le mental qui ne veut pas. Qui voudrait que ça s’arrête. Ou au moins que l’on ralentisse. Qui pense à une bonne couette. Bref, plein d’options bien plus normales que de continuer un effort qui a déjà trop duré.

Pour arriver à tenir, l’important était pour moi de pouvoir débrancher le cerveau le plus tôt possible. Car après 2h de course en général, je m’ennuie. Lors de cette SaintéLyon, la fatigue aidait à ce que le cerveau se mette en pause tout seul. Mais surtout, impossible de s’ennuyer. Courir dans le noir c’est magique. Se laisser bercer par le bandeau de frontales. Être hypnotisé par les reflets des bandes réfléchissantes des tenues de autres coureurs. Tout éteindre en arrivant sur du bitume pour profiter des étoiles.

Et puis, courir la nuit, c’est aussi croiser un public motivé, qui installe des feux le long des chemins. Cela réchauffe l’atmosphère, mais aussi le cœur. Cela aide à trouver le sursaut d’énergie permettant de continuer au même rythme. Ça casse la routine. Et à 4h du matin, je ne m’attendais pas à croiser encore autant de monde, avec autant d’ambiance ! Au moment où le traileur en a le plus besoin !

L’alternance de montées, descentes, chemins & routes permet aussi de varier les efforts, et donc de s’occuper l’esprit. Pour moi, chaque portion avait ses avantages et inconvénients. Les montées se font en marchant, mais ça monte, donc ça demande quand même un gros effort. Les descentes permettent de se décontracter les jambes, quand elles ne sont pas trop pentues, qu’il n’y a pas trop de verglas. Les chemins sont agréables pour les genoux, mais pas pour les chevilles. Contrairement aux routes. Et donc j’attendais avec impatience la prochaine surface afin de m’occuper un peu l’esprit, et de faire souffrir un peu moins le corps.

Physiquement, tout a tenu. Mon genou, une fois strapé, ne m’a pas lancé. Et je pensais à chaque fois à contrôler les descentes. Je n’ai pas eu froid, en ayant pourtant seulement 2 couches. Le seul problème aura finalement été les crampes. Je pense que le froid les provoquait. La prochaine fois, je courrais avec de grosses chaussettes montantes afin de garder mollets et chevilles au chaud.

Et pourtant, il ne faisait pas si froid. Nous avons eu une bonne météo, avec un ciel dégagé, des températures négatives, mais pas trop, et seulement un peu de verglas. En fait il faisait même trop beau, on m’avait vendu la SaintéLyon sous la neige !

Merci

Et bien sûr un gros merci à tout ceux qui ont fait parti de cette aventure :

  • Le groupe de traileurs du week-end : Rémi, Tim, Céline, Béa, Marine, …
  • Thomas pour son coaching qui marche
  • Kot pour les premiers kilomètres d’accompagnements, Tim pour les 44 derniers
  • Colombe qui était déchainée sur Facebook, mais aussi tous les autres likeurs. Ces petits messages font toujours du bien !
  • Élise et son papa pour les croissants MIAM !!!
  • Les autres participants : les quelques échanges que j’ai pu avoir sur la piste ont toujours été super agréables !
  • Et puis tout le PUC : on s’amuse, on se lance des défis, et au final on dépasse nos limites !

Et maintenant ?

L’une des premières questions qu’on m’a posé, c’est de savoir si je la referai. Sur le coup, je ne voulais pas répondre. Les douleurs dans les jambes étaient bien trop présentes. Puis la réponse a été non. A quoi bon remettre ça, alors qu’il y a peu de chances que je puisse améliorer mon temps. Et puis 3 jours plus tard… et bien pourquoi pas. Pour avoir d’autres conditions météo. Pour essayer de la faire cette fois-ci sans aide. Ou alors au contraire pour accompagner quelqu’un. Ou même essayer de passer sous les 8h. Pour le moment, je ne vois pas comment c’est possible, mais il y a un an, je ne me voyais pas non plus faire cette course.

Ce qui est sûr, c’est que ce ne sera pas un objectif principal de 2017, mais vu qu’après septembre je n’ai rien de prévu…

Et toi, tu t’inscris l’année prochaine ?

finisher